ENNÉASYLLABE
DÉPRESSION
tout va mal dans le pire des mondes
LRULDT
Tout d'abord il y eut ce mai
Un mai gai un mai frais et tendre
C'est à ce mois de mai vrai que je nais
Et que je m'apprête à attendre
voir sentir ouïr toucher goûter
Alors je devins par mes mères
Nombreuses et hierarchisées
Un garçon rempli de mystères
Qui cachait à tous ses secrets
Au monde aux bêtes à son père
Il grandit en France enfermé
Dans une ville sale et noire
Rome Londres les orangers
Du jour à la nuit point de soir
Seulement le soleil lassé
Il n'était pas un seul nuage
Dans son front et son jardin jaune
Mais Dieu que ce garçon est sage
Il ne regarde pas les faunes
Mais rêve de triomphe sur la plage
Puis vint le voyage plus loin
Plus près encore de Paris
De la Seine et après un point
de la Rive Gauche chérie
Ses petites rues et ses coins
Un lama s'éveillait orange
À travers lui brillait le ciel
Rose comme l'oeil de Solange
Doux et tendre comme si elle
Rêvait qu'enfin tu la venges
Puis ce fut la parfaite clé
Androgyne élégante et belle
Comme les prés un soir d'été
Pleins d'agréable fraxinelle
Qu'ensemble l'on aurait fumé
IDÉES
—VOGUE excepté
Pour la suppression de quelque chose — on trouvera bien quoi
l'hiver, par exemple, et le mois de février
J'aimerais que l'on m'informât des moyens
qui mènent à ma fin : écrire une lettre à Monsieur Lagerfeld
Pour que l'on reconnaisse qu'à cinquante ans,
Madame de La Fressange efface discrètement les inélégantes
et jeunes anorexiques droguées et pas du tout Left Bank
Pour que les dandys la regrettent avec fierté
Pour que Lord Nudle devienne très riche très vite
Que nous puissions fuir quelque part
réaliser un film
et cætera
Liberté chérie
J'aimerais être à la fois un poète et une élégante
les deux seuls êtres qui gouvernent un monde que vous ne verrez jamais
un poète qui raconte les rêves les désirs des autres poètes
une élégante qui éclaire l'été de son sourire
et tue l'hiver à la seule force de l'orteil
et conclut dans le triomphe la cheville rouge et noire